Dans le cadre du suivi du plan de gestion du Marais Chantraine 2014-2018, le Conservatoire d'Espaces Naturels de Picardie a engagé des travaux de restauration d'une mare située sur des parcelles communales au nord-est de l'étang.   (semaine 6 et 7)

Description des objectifs et opérations de gestion 

Les milieux naturels évoluent selon une dynamique propre, parfois lente et dont la vitesse d'évolution est difficile à estimer.  La gestion consiste notamment à agir sur ces dynamiques naturelles. 

Ainsi, la dynamique naturelle des habitats herbacés est de tendre vers un boisement. Sans intervention humaine, on assiste à plus ou moins long terme à l'installation d'une friche puis à un reboisement des "milieux ouverts". Ce type d'évolution aboutie à une homogénéisation et une banalisation des milieux. Les actions de gestion consistent à maintenir des mosaïques d'habitats pour préserver une diversité d'espèces dont certaines sont patrimoniales. 

 Concernant les milieux aquatiques, la tendance naturelle pour les eaux non courantes est l'envasement et l'eutrophisation. C'est le cas des mares si aucun entretien n'est fait.

Les travaux mis en oeuvre sont donc destinés à assurer le maintien de la richesse écologique de l'étang et de ses abords et voir à la renforcer. Il s'agit de conserver les habitats les plus remarquables (mares), de favoriser la diversité des formations végétales sur les zones à fort potentiel et d'accueillir une faune et une flore riches et variées sur le long terme. 

Le site regroupe 6 mares  et plusieurs dépressions (de taille variable). Elles sont essentiellement alimentées par la nappe phréatique et en faible proportion par les eaux de ruissellement. Le niveau de la mare est donc directement lié à celui de la nappe. Ces mares qui présentent un intérêt certain pour les amphibiens sont peu profondes et sont pour l'essentiel dépourvues de végétation aquatique.  

En résumé, les objectifs de la gestion d'une mare sont multiples :

  • maintenir ou améliorer la capacité d'accueil des mares en intervenant sur les biotopes et les habitats d'espèces
  • conserver l'intérêt écologique des mares et leur cortège d'espèces associées (amphibiens, insectes, oiseaux ...)
  • favoriser le cycle biologique des amphibiens en retardant l'assèchement de la mare
  • favoriser le développement de la flore rivulaire et des espèces associées.
Action de mise en lumière des mares
La présence excessive d'arbres et d'arbustes autour, voire dans la mare, a plusieurs effets indésirables : 
  • par manque de lumière, la végétation herbacée disparaît progressivement
  • la production d'oxygène diminue alors en conséquence, ce qui contribue à eutrophiser la mare et compromet son fonctionnement et sa qualité biologique
  • tous les ans à l'automne, les feuilles mortes tombent dans la mare, elles enrichissent l'eau en matière organique et accélère le processus de comblement. Ces feuilles en décomposition participent aussi à l'acidification de l'eau. Certaines essences d'arbres peuvent être toxiques lors d'un apport trop important de feuilles (c'est le cas du saule, du chêne, du châtaigner, du noyer et du genêt)
  • les érables et les aulnes ont un fort besoin en eau. Leurs racines pompent directement de l'eau qui sera rejetée dans l'air par évapotranspiration. Ce phénomène tend à provoquer l'assèchement de la mare. 
Donc, à terme et sans entretien, l'évolution naturelle des mares du site est le comblement. Il se fait lentement par accumulation de matières organiques (feuilles) et conduit à un boisement par implantation des espèces pionnières des milieux humides (saules, aulnes, frênes, bouleaux). 
Eclaircir une mare ne signifie pas supprimer tous les arbres et arbustes. Il faut trouver un juste milieu. D'une matière générale, les arbres et arbustes contribuent à diversifier les milieux de vie à proximité des mares et donc a augmenté les potentialités d'accueil pour la faune. 
Les mares  ouvertes en milieu forestier sont des territoires de chasse très prisés pour les chiroptères (chauve-souris). 
Sur les 6 mares, 3 seulement feront l'objet d'une restauration car même si les mares ouvertes ont une diversité plus importantes que les mares ombragées, ces dernières regroupent quelques espèces que l'on ne trouve pas ailleurs. En effet, boisements et secteurs en eau ont toujours été en contact, par conséquent de nombreuses espèces se sont adaptées à cette association. 

Espèces concernées par la restauration des mares
  • Les amphibiens
Sur le site, 5 espèces d'amphibiens ont été observées : 
- la grenouille agile avec des pontes observées dans 4 des 6 mares et dans l'étang. Cette espèce est intimement liée au boisement de feuillus. Elle se reproduit dans les mares forestières de faible profondeur. Elle est très sensible à l'exploitation forestière (destruction du milieu). Cette grenouille est assez rare et déterminente ZNIEFF en Picardie et elle est citée en annexe 4 de la directive "Habitat".
- la salamandre tachetée avec des larves dans une des 6 mares. Cette espèce spectaculaire vit essentiellement dans les forêts humides de feuillus et se reproduit dans les mares et les fossés même de dimension modeste. C'est une espèce très sensible à la pollution des eaux et à la circulation en forêt. Elle est peu commune en Picardie.
- le triton palmé avec 6 pièces d'eau occupées par l'espèce dans les boisements humides. Ce petit triton se reproduit dans des mares sans poisson et des fossés. L'espèce est peu commune en Picardie.
- la grenouille rousse avec quelques individus dispersés observés dans les boisements. Sa reproduction a probablement lieu sur le site. Cette grenouille a des exigences variées en matière d'habitat mais on la trouve dans des secteurs moins ouverts que la grenouille verte. Les mares de reproduction peuvent être de dimension et profondeur réduites. Elle est mise en danger par la destruction des sites de ponte, notamment par la circulation motorisée sur les chemins de terre, l'empoissonnement des mares et l'écrasement des individus sur les routes lors de leur migration. 
- le crapaud commun avec plusieur sites de ponte localisées sur les rives est et ouest du plan d'eau, sur 2 mares dans les boisements ainsi que dans les fossés bordant les chemins d'accès au plan d'eau. Cette espèce se reproduit dans les mares et les étangs même profonds et de grande dimension avec ou sans poissons. Ces sites de ponte sont généralement forestiers ou situés à proximité. Le début de la période de reproduction donne lieu à d'impressionnantes migrations d'individus se dirigeant vers leur site de ponte. Lors de ces évènements, les crapauds passent parfois sur les axes routiers qui représentent dans ce cas, un facteur important de mortalité. 

  • Les reptiles

 Sur l'ensemble du site du Marais de Chantraine, 5 espèces de reptiles ont été observées. Une seule espèce est directement liée aux actions de restauration des mares. Il s'agit de la couleuvre à collier. Cette espèce a été observée le long de la voie ferrée mais également sur les lisières, dans les boisements et dans le plan d'eau près des rives. Ce serpent semi aquatique recherche les secteurs humides comportant des fossés en eau, des rivières ou des mares. Cette espèce souffre de l'assèchement des milieux qu'elle occupe et de la destruction physique malheureuse dont les individus font souvent l'objet alors qu'ils sont totalement inoffensifs. 


  • Les chiroptères

- le Murin de Bechstein est une espèce très liée aux boisements matures de feuillus. Ceux-ci doivent regrouper des strates diversifiées avec des sous-bois à végétation arbustive et herbacée ainsi que du bois mort au sol.  Les individus peuvent également chasser dans des espaces plus ouverts notamment au bord des eaux, étangs et mares en milieu forestier. Dans la plupart des cas, les individus chassent dans le secteur où se trouve leur gîte. Ce dernier est parfois éloigné du lieu de chasse que de quelques dizaines de mètres.  Le gîte estival est arboricole, souvent dans une loge creusée par un pic. En hiver, les individus se réfugient dans les grottes (vieilles carrières). Du fait de ces exigences, l'espèce est menacée par la sylviculture intensive qui élimine trop souvent les arbres matures à cavité et limite la diversité des formations végétales forestières. Le trafic routier est un facteur de mortalité particulièrement important. Cette espèce est rare à très rare et déterminante ZNIEFF en Picardie. Elle est citée en annexe II de la Directive "Habitat". 

- le Murin à oreilles échancrées. Cette espèce recherche des secteurs à habitats diversifiés avec des boisements de feuillus, des prairies ainsi que des espaces humides. Les individus partent chasser notamment dans les milieux boisés, aux abords des arbres isolés, dans les parcs, les vergers dans un rayon maximum de 15 km. Ils passent d'un territoire de chasse à l'autre en suivant des routes de vol rectiligne en dehors de toute végétation et auxquelles ils sont très fidèles. Par ses habitudes de déplacement, cette espèce est sensible au traffic automobile. Cette espèce est rare et déterminante ZNIEFF en Picardie. Elle est citée en annexe II de la Directive "Habitat".

- la Noctule de Leisler. Etant très mobile, cette espèce peut chasser loin de ses gîtes. Elle recherche fréquemment ses proies en milieu ouvert et choisit ses gîtes en forêt dans les trous d'arbres, générallement issus du pourrissement ou du forage des pics à plusieurs mètres du sol par sécurité. Cette Noctule est rare à très rare et déterminante ZNIEFF en Picardie. Elle est citée en annexe IV de la Directive "Habitat".

- la Pipistrelle de Nathusius. Observée en bordure ouest du plan d'eau, cette espèce typiquement forestière se rencontre dans les boisements de feuillus.  Le plus souvent, les espaces fréquentés comportent également des étangs, des mares ou des cours d'eau (la rivière Le Thérain comme ici).  Pour gîter au printemps et en été, les individus recherchent les arbres ceux ou fissurés. En hiver, les individus hibernent dans les anfractuosités et les trous d'arbres ainsi que sous les écorces un peu décollées. La sylviculture intensive et la destruction des milieux humides représentent les menaces les plus importantes pour cette espèce. Cette chauve-souris est rare à très rare et déterminante ZNIEFF en Picardie. Elle est citée en annexe IV de la Directive "Habitat". 

- la Noctule commune. On la rencontre en bordure du plan d'eau. Il s'agit d'une espèce sylvicole qui appartient au groupe des chauves-souris européennes à migrations saisonnières importantes. Les individus gîtent le plus souvent dans les trous d'arbres au tronc d'un diamètre de 50 cm au minimum, elles chassent de préférence dans un espace aérien libre sans obstacle et riche en insectes (au-dessus de l'étang). Cette espèce est assez rare à rare et déterminante ZNIEFF en Picardie. Elle est citée en annexe IV de la Directive "Habitat".

- l'Oreillard gris. Cette espèce fréquente des secteurs aux habitats variés regroupant des prairies, des boisements et des villages.  Les individus chassent souvent près des éclairages publics. Les gîtes estivaux se trouvent pour la plupart dans des bâtiments, notamment dans les combles (église, grange, vieux greniers ...). En hiver, les individus hibernent aux mêmes endroits ainsi que dans des caves et autres souterrains (carrières). L'espèce est souvent victime des réaménagements de bâtiments. Elle est rare et déterminante ZNIEFF en Picardie. Elle est citée en annexe IV de la Directive "Habitat".

- le Murin de Daubenton. On le retrouve sur plusieurs secteurs de chasse en bordure du plan d'eau et du Thérain. Des cris sociaux en septembre indiquant de probables accouplements dans le secteur ont été relevés, plus précisément à l'extrémité ouest du plan d'eau. De toutes les chauves-souris européennes, cette espèce est l'une de celles qui sont les plus liées aux milieux humides. Elle chasse très souvent au-dessus du plan d'eau et de la rivière mais elle capture aussi ses proies dans les allées forestières. En été, elle gîte dans des cavités d'arbres feuillus, y compris sous les écorces décollées ou dans des anfractuosités sous des ponts ou des passages souterrains au-dessus de l'eau pour lesquels elle fait preuve d'une grande fidélité.  Cette espèce est peu commune en Picardie. Elle est citée en annexe IV de la Directive "Habitat".


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